La Convention du Conseil de l’Europe sur la prévention et la lutte contre la violence à l’égard des femmes et la violence domestique, dite Convention d’Istanboul, est entrée en vigueur dans notre pays le 1er avril 2018, il y a donc quatre ans, et parfois on se demande si l’info est arrivée jusqu’à la POLouest. Car elle implique aussi les forces de police, comme nous le verrons par la suite. Les buts de cette convention sont notamment:
- de protéger les femmes contre toutes les formes de violence, et de prévenir, poursuivre et éliminer la violence à l’égard des femmes et la violence domestique;
- de concevoir un cadre global, des politiques et des mesures de protection et d’assistance pour toutes les victimes de violence à l’égard des femmes et de violence domestique;
- de soutenir et d’assister les organisations et services répressifs pour coopérer de manière effective afin d’adopter une approche intégrée visant à éliminer la violence à l’égard des femmes et la violence domestique.
Ainsi, cette convention concerne toutes les formes de violence envers les femmes, y compris la violence domestique qui y est explicitement et systématiquement mentionnée.
Par «violence domestique», on entend tous les actes de violence physique, sexuelle, psychologique ou économique qui surviennent au sein de la famille ou du foyer ou entre des anciens ou actuels conjoints ou partenaires, indépendamment du fait que l’auteur de l’infraction partage ou a partagé le même domicile que la victime.
En ratifiant cette convention, la Suisse s’est notamment engagée à promouvoir ou conduire, régulièrement et à tous les niveaux, des campagnes ou des programmes de sensibilisation […], pour accroître la prise de conscience et la compréhension par le grand public des différentes manifestations de toutes les formes de violence couvertes par le champ d’application de la Convention et leurs conséquences sur les enfants, et de la nécessité de les prévenir. Ceci, afin d’assurer une large diffusion parmi le grand public d’informations sur les mesures disponibles pour prévenir les actes de violence envers les femmes.
La Convention d’Istanbul impose aux pays signataires de prendre les mesures nécessaires pour protéger toutes les victimes contre tout nouvel acte de violence. Elle engage aussi les parties à prendre les mesures nécessaires pour que les victimes reçoivent une information adéquate et en temps opportun sur les services de soutien et les mesures légales disponibles, dans une langue qu’elles comprennent et que les professionnels soient formés afin de fournir une assistance aux victimes et de les orienter vers les services adéquats.
La mise en place de permanences téléphoniques gratuites, accessibles vingt-quatre heures sur vingt-quatre, sept jours sur sept, est également une obligation introduite par la convention pour fournir aux personnes qui appellent, de manière confidentielle ou dans le respect de leur anonymat, des conseils concernant toutes les formes de violence envers les femmes, notamment, on l’a vu, la violence domestique. Notons que dans notre canton, plusieurs numéros d’appel sont donnés comme référence sur le site de l’État de Vaud, dont le 117 en première place. Donc, le central de police-secours.
La prise en charge des enfants témoins de ces violences doit également être assurée dans l’offre des services de protection et de soutien aux victimes, afin que leurs droits et besoins soient correctement pris en compte.
En matière de signalement, il est prévu que les Parties prennent les mesures nécessaires pour encourager toute personne témoin de la commission de tout acte de violence envers une femme, ou qui a de sérieuses raisons de croire qu’un tel acte pourrait être commis ou que des nouveaux actes de violence sont à craindre, à les signaler aux organisations ou autorités compétentes.
De manière plus globale, et cela concerne directement la POLouest, les pays signataires doivent prendre les mesure nécessaires pour que les services répressifs responsables répondent rapidement et de manière appropriée […] en offrant une protection adéquate et immédiate aux victimes.
Les services répressifs responsables engagent rapidement et de manière appropriée la prévention et la protection des victimes, y compris l’emploi de mesures opérationnelles préventives et la collecte des preuves. Une appréciation du risque de létalité, de la gravité de la situation et du risque de réitération de la violence doit également être faite par toutes les autorités pertinentes afin de gérer le risque et garantir, si nécessaire, une sécurité et un soutien coordonnés. Cette appréciation doit prendre dûment en compte, à tous les stades de l’enquête et de l’application des mesures de protection, le fait que l’auteur d’actes de violence possède ou ait accès à des armes à feu.
De plus, des ordonnances d’injonction ou de protection appropriées doivent être disponibles pour les victimes. Ces ordonnances doivent notamment être disponibles pour une protection immédiate et sans charge financière ou administrative excessive pesant sur la victime; et émises ex parte avec effet immédiat.
Ceci étant posé, je pose les questions suivantes au Comité directeur de la POlouest.
Convention d’Istanbul
- Une analyse des mesures à mettre en place au sein de la POLouest a-t-elle été effectuée depuis 2018 suite à la ratification de la Convention d’Istanbul par la Suisse, afin de s’y conformer ? Si oui, qu’en est-il ressorti ? si non, pourquoi ?
- Des directives émanant d’autorités supérieures, cantonales ou fédérales, ont-elles été transmises à la POLouest afin de se conformer aux exigences de cette convention ? Si oui, quand et lesquelles ?
- Existe-t-il des statistiques spécifiques sur les violences faites aux femmes et sur la violence domestique dans le district de l’Ouest lausannois ? Si oui, où sont-elles disponibles ? Si non, pourquoi ?
- Dans la main courante, l’événement d’août 2021 est simplement décrit comme un «Litige», sans autre précisions. Le système informatique de la POLouest ne permet-il pas techniquement de décrire plus précisément les motifs d’intervention en cas de violences spécifiques, conjugales par exemple ?
Sensibilisation destinée au public
- La POLouest envisage-t-elle de lancer une campagne de sensibilisation sur les questions de violences domestiques et leurs conséquences sur les enfants témoins de telles violences ? Si oui, prévoit-elle de le faire seule ou en partenariat avec les organes compétents en matière d’égalité ? Et par quels canaux ? Si non, pourquoi ?
- Comment entend-elle – enfin – intégrer cette thématique à son site Internet, que ce soit dans une optique de prévention, d’information ou de signalement ?
Formation destinée au personnel
Étant entendu que ces questions concernent également les membres de la gendarmerie vaudoise participant aux patrouilles dans le cadre du projet Régio, quelles formations le personnel de la POLouest a-t-il reçu :
- en matière de violences faites aux femmes et particulièrement de violence domestique, afin d’en comprendre les spécificités ? Ces cours revêtaient-ils un caractère obligatoire ?
- pour la prise en charge de femmes victimes de violences, particulièrement le personnel de terrain et de réception téléphonique ou aux guichets ? Ces formations revêtaient-elles un caractère obligatoire ?
- pour la prise en charge des enfants victimes et/ou témoins de violences domestiques, particulièrement le personnel de terrain et de réception téléphonique ou aux guichets ?
- en matière d’orientation vers les services adéquats, particulièrement le personnel de terrain et de réception téléphonique ou aux guichets ?
- Combien de personnes ont-elles participé à chacune de ces formations ?
Soutien aux victimes
- Quelles mesures sont-elles prises pour protéger les victimes contre tout nouvel acte de violence ? Une évaluation de la létalité, de la gravité de la situation et du risque de réitération de la violence est-elle systématiquement faite afin de gérer le risque et garantir, si nécessaire, une sécurité et un soutien coordonnés. Cette appréciation prend-elle en compte le fait que l’auteur d’actes de violence possède ou ait accès à des armes à feu ?
- La POLouest travaille-t-elle de manière coordonnée avec d’autres acteurs sur cette thématique ? Si oui, lesquels ?
- Quelles informations reçoivent les victimes – et à quel moment – sur les services de soutien et les mesures légales disponibles ? Ces informations sont-elles fournies dans une langue qu’elles comprennent ? Sont-elles uniquement transmises oralement ou existe-t-il des supports papier (dépliants, etc.) ?
- Dans quels délais interviennent les patrouilles en cas d’appel de détresse lié à des violences domestiques ? Ces interventions sont-elles prioritaires dans l’appréciation de l’urgence ?
- Les victimes peuvent-elles obtenir immédiatement une ordonnance d’injonction ou de protection ? Les forces de polices sont-elles habilitées à en délivrer lors de leurs interventions de terrain ?
Personnel de la POLouest
- On peut imaginer qu’un collaborateur de la POLOUEST ait pu être l’auteur de ce type de violences. Dans ce cas, auprès de qui, hors hiérarchie, ce collaborateur peut-il en parler et discuter d’éventuelles difficultés à faire face à ces situations ?
- Selon la nature des réponses apportées à cette interpellation, merci de nous dire les actions que le comité directeur décide de mettre en place et dans quel délai.
Je remercie d’avance le comité directeur de ses réponses.
Yan Giroud et consorts
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